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23 mars 2017

Karine et ses guides 🇺🇸 🇨🇦: 2 Un nouveau départ

Mes bien chères sœurs, mes bien chers frères,

Je reviens aujourd'hui avec la suite de mon reportage sur Karine, notre québécoise et ses chiens-guides (pour relire la première partie, 



Cliquer ICI). J'ai donc communiqué à nouveau avec le Canada et je vous invite à lire la suite de cet entrevue. 

  

Yuka : Alors le félin, t'as assez dormi ? Nous pouvons continuer ?

Terroriste : Oh, mais t'en as mis du temps ! Je pensais que tu m'avais oublié et que tu n'étais plus intéressée par mes histoires.


M.A. : Non mais t'as fini d'insulter les amis, toi ? Je vais le prendre, c'est pas comme si je n'avais pas eu le temps d'apprendre le français en six mois. Et puis, entre congénères et collègues, nous sommes bien placées pour nous comprendre !

Yuka : Eh salut Miss America, heureuse de pouvoir enfin tenir une conversation constructive avec toi, ma pote !

M.A. : Je suis aussi très heureuse de pouvoir enfin te parler sans intermédiaire. Bien que maintenant, nous ayons un autre membre canin dans notre famille, elle serait sûrement plus adaptée que le Terroriste.

Yuka : oh super, tu as un pote pour jouer avec toi ! Vous n'êtes pas trop de deux pour neutraliser le félin qui hante les lieux !

M.A. : Une pote. C'est une carlin ! Nous étions après l'avoir, oui, nous avions presque réussi à le rendre fou mais hélas les humains y ont mis bon ordre : ils ont mis une barrière et maintenant, seulement lui a accès à la chambre. Moi, je m'adapte, mais la petite trouve des fois ça injuste. Ils nous ont expliqué que c'était une mesure pour encourager la bonne entente et la cohabitation positive. Ça fonctionne cette technique d'humains. Maintenant, le terroriste et Abby se partagent la causeuse (NDE : désigne un sofa deux places au Québec). 

Yuka : c'est toujours la même chose : c'est nous qui travaillons et les chats qui se prélassent sur les lits des humains !

M.A. : En effet. Au moins, nous faisons courir le nôtre un peu !

Yuka : vous avez de la chance, ici elles sont deux à me narguer ! 

(...) bon revenons à nos moutons. Il y a 6 mois, le Terroriste m'avait expliqué que ton humaine avait été convoquée pour une classe.

M.A. : Oui, c'était à la fin avril. Mon école – la Guide Dog Foundation for the blind – lui a envoyé ses billets d'avion et ils sont allé la chercher à l'aéroport de La Guardia (NB c'est à Long Island en bordure de la ville de New York) afin qu'elle puisse commencer sa formation.

Là-bas, les instructeurs lui ont fait faire la visite des lieux, ont observé sa vitesse de marche et son niveau d'autonomie. Ils ne s'étaient pas encore décidés à 100% sur le chien qu'ils lui attribueraient. Elle a fait ce qu'ils appellent «juno walk», de la marche avec un chien simulé. 
juno walk
C'est à dire que l'instructeur tient une poignée de harnais et la personne non-voyante se tient à l'autre bout, comme si elle tenait vraiment un harnais, ceci afin qu'elle puisse se familiariser avec les bons gestes à poser avec son futur chien. Ils ont également travaillé le «footwork», les commandes vocales et autres.

Yuka : le «footwork» ? C'est quoi, ça ?

Le «footwork» ou, autrement dit la gestuelle est la clef pour bien communiquer avec nous, les guides. Comme tu sais, nous les chiens, nous sommes experts en décodage de langage corporel. Alors, avec la bonne gestuelle, la communication est fluide et efficace.

Yuka : Ah oui ? C'est quoi ça ? Tu peux me donner des exemples, je ne crois pas avoir appris ça, dans ma fac !

M.APar exemple, pour bien communiquer les changements de direction, lorsque nous sommes à l'arrêt et que mon humaine veut que nous allions à gauche, elle se tourne à 90 degrés, perpendiculaire à moi et se place plus au niveau de l'avant de mon corps, car quand elle me dira: «left» je vais tourner à ma gauche et me mettre en marche en m'alignant sur la direction désirée. Elle va avancer son pied droit en premier, de cette façon, aucun risque de m'écraser les pattes.

Pour tourner à droite à partir d'une position arrêtée, elle va se reculer d'un demi-pas de façon à ce que j'aie l'espace pour passer devant elle et  elle va positionner son pied droit en angle afin de bien indiquer l'angle de la trajectoire souhaité. Quand elle dira «right», je vais passer devant elle et la guider sur la trajectoire désirée. Encore une fois, elle va faire son premier pas du pied droit afin d'éviter tout risque de me marcher sur les pattes.

Yuka : est-ce que Karine avait reçu les ordres vocaux avant d'arriver dans la classe ? 


M.A. : Oui, et pas que ça. Il y a une clef usb complète de documents à notre propos. Le type de jouets recommandés et des suggestions de jeux, les commandes vocales, un texte sur la gestuelle et les positions, un texte sur comment nous pensons et sur comment nous apprenons, comment bien administrer les récompenses afin qu'elles restent efficaces, les informations sur les différentes techniques dans les différents moyens de transport, le toilettage, les soins vétérinaires, les étapes pour devenir une équipe à succès, comment introduire de nouvelles routes, etc. Tout ce qui sera vu en classe est envoyé en format accessible afin que le futur utilisateur puisse étudier et avoir une idée de ce dans quoi il s'embarque. C'est toute une aventure d'engager un chien diplômé, autant  pour nos humains que pour nous ! Ils ne doivent pas oublier que pour nous, c'est toute une aventure de guider un humain !

Yuka : revenons à ces exercices de «juno walk» tu les as eu le jour de ton arrivée ? Car je crois savoir que c'est le lendemain que tu as été attribuée à Karine ! 


M.A. : Non, ils les ont fait le lendemain matin. Le jour de l'arrivée, ils sont arrivés, ont fait la visite des lieux, se se présentés et les instructeurs leur ont expliqué le déroulement de la classe. Le premier matin, les apprentis ont fait la JunoWalk, ils ont révisé les commandes vocales ainsi que toute la gestuelle et le positionnement. Les instructeurs ont aussi validé la vitesse de marche de leurs étudiants et finalisé leur choix. Avant le repas du midi, les étudiants ont appris avec quel chien ils allaient être pairés et après le dîner, j'ai enfin rencontré Karine. 

Pendant l'heure du dîner, une fois que les choix des instructeurs ont été faits, nous, les chiens, sommes passé au toilettage. Nous devions être tout beaux et tout propres pour rencontrer nos nouveaux humains. Moi, j'étais tellement contente que j'ai bu plein d'eau savonneuse pendant qu'on me lavait et j'ai passé ma première nuit à vomir. Ahah ! La mousse de shampoing, c'est chouette à manger mais le résultat est moins amusant pour les humains. Au moins, j'ai tout de suite pu savoir que ma nouvelle humaine s'occuperait bien de moi. Fallait bien que je teste celle à qui j'étais sur le point d'être confiée ! Non ?

Yuka : eh bien tu as fait fort, collègue ! Je me demande comment elle aurait réagi, mon humaine débutante ! 

Et sinon, vos débuts, c'était comment ? 

(...) et qu'avez-vous fait ensuite ?


M.A. : Le premier après-midi, nous avons travaillé quelque chose de vraiment spécial. À GDF, on nous apprend, à nous les chiens, à guider en laisse. Les instructeurs disent à leurs élèves : «nous savons que vous vous faites guider par vos chiens même sans harnais pour de petites choses, alors autant bien s'assurer que ce soit bien fait». Donc, le premier après-midi, nous nous sommes  déplacé ensemble dans le centre d'hébergement. J'ai eu droit à plein de récompenses car il fallait apprendre à se connaître et à travailler ensemble. Nous avons révisé la technique pour les escaliers et le soir, j'ai été attachée seule dans notre chambre pendant que ma nouvelle partenaire assistait à une discussion sur la transition entre deux chiens. C'était une soirée vraiment bénéfique pour les utilisateurs de chien-guide d'expérience. Après cette très grosse journée riche en émotions et en découverte, comme vous le savez déjà, j'ai empêché Karine de bien dormir. Le jeudi matin, c'était notre première balade au parc, sur un circuit piétonnier. Et là, c'était fan-tas-tique ! Notre vitesse était parfaitement ajustée et mon entraîneur, Michael, était vraiment fier de moi.

Yuka : Super ! Top !

M.A.: Étant donné que je suis un chien exemplaire, qui apprend vite et qui est très sage et que mon humaine est une navigatrice d'expérience qui avait eu plusieurs collègues entre les mains avant moi, l'entraînement s'est vraiment bien passé.

À GDF, la classe se poursuit pendant deux semaines et plus le temps avance, plus le niveau de difficulté augmente. Nous voyons tous les endroits susceptibles de se retrouver sur notre chemin. Nous allons même à Central Park et là-bas, les amis, s'il n'y a pas 100 chiens par balade, c'est dire que nous n'en voyons pas. Ceci sans compter les pigeons, les chevaux et les gens ! Moi, Miss America, j'avais déjà vu tout ça, mais mon humaine, elle, n'était au courant de rien parce que j'ai tellement bien travaillé que rien n'a réussi à me distraire.

Puis, après un «Célébration Sunday» où j'ai pu revoir mes «Puppy Raisers» (famille d'accueil), et où le service des communication avait préparé une vidéo et un montage photo, c'était la fin. 

Le lendemain, 2 mai, nous prenions l'avion vers Pierre-Elliott-Trudeau et ce fut le début de ma nouvelle vie.

Il parait qu'au début, j'ai trouvé les trottoirs vraiment bizarres et que je n'osais plus avancer parce qu'il y avait tellement de trous que je craignais que mon humaine se brise quelque chose. Évidemment, je ne me souviens pas de ça, maintenant, je fonce, même sur la glace ! 

Évidemment, parfois la vie ne nous donne pas ce qu'e nous voulons. Après notre retour à la maison, Karine s'est aperçue que je faisais mes besoins trop souvent et de façon incompréhensible et incohérente. J'ai donc passé toute une batterie de tests. Un vétérinaire m'a fait subir des quantités de prises de sang.

Ça inquiétait tout le monde parce que le vétérinaire n'a rien trouvé.

Jusqu'à ce que Karine finisse par décider de visiter une deuxième vétérinaire qui m'a fait passer un dépiste pour le diabète insipide.

Le résultat fut positif. Elle avait finalement trouvé ce dont je souffre.

Il ne s'agit pas d'une maladie très grave, mais ça compromet totalement ma carrière de chien-guide. Évidemment, il est possible de me traiter avec des médicaments mais ma vessie reste quand même fragile et je peux avoir envie n'importe quand.

Pendant tout l'été, Karine était en contact avec son école qui l'a vraiment supportée dans ses démarches, qui a payé mes tests vétérinaires et qui a décidé de payer mes médicaments le temps qu'ils lui trouvent un ou une remplaçant(e).

Le soutien et la compréhension du personnel de Guide Dog Foundation ont vraiment été très précieux pour mon humaine. Elle s'est sentie, écoutée, respectée et rassurée pour pouvoir continuer à travailler avec moi jusqu'au renouvellement.

Quant à moi, je retournerai à New York et on me trouvera une nouvelle carrière. Je ne sais pas encore ce qui adviendra de moi, ni de Karine mais je vous donnerai des nouvelles dès que j'en aurai, promis !

Je suis arrêtée au bord d'un trottoir devant un passage piéton. Karine est attentive,
Michael son instructeur, est à côté d'elle et nous observe avec attention
Nous venons de traverser une rue, mon humaine me donne une croquette
Nous sommes vues de dos en train de traverser, Michael est à côté de nous
Mon humaine et moi sommes de profil devant une fontaine avec une statue au fond
Nous cheminons à côté de la fontaine, et sommes vues de dos, Michael est à ma gauche
De profil sur une place. Une inscription sur une pierre indique :
«Ronald P. Stanton Way»
Nous sommes de profil devant une grande bâtisse

Yuka & Talaria 💞 Merci de votre visite. N'hésitez pas à liker, à partager, à commenter. Votre avis m'intéresse ! À bientôt pour des prochaines aventures 🐾👣

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